(F) Tabrett Bethell | Morag Kinnaird

Travailleuse acharnée, elle n'a jamais eu de craintes face aux heures de travail à effectuer, et ce n'est que lorsqu'elle est en couches qu'elle s'octroie un rythme plus léger. Issue d'une fratrie nombreuse, elle a été la seule à préférer travailler plutôt que s'amuser avec l'argent acquis par les parents. Souvent rabrouée pour son côté trop sérieux et têtue, elle met tout le monde d'accord de par sa très grande finesse dans le tissage. Sa matière préférée est simplement la laine, qu'elle mélange régulièrement avec d'autres fils pour obtenir une matière presque souple pour les classes sociales supérieures, dont elle fait partie d'une certaine façon, même si elle se défini comme n'importe quelle autre femme du peuple. Elle est plutôt modeste, dans la plupart des aspects de sa vie, mais ne peut s'empêcher d'aimer les ragots et d'en inventer certains. Surtout sur les autres femmes de son âge, qui souvent se sont moquées d'elle lorsqu'elles étaient adolescentes et jeunes adultes, parce que Morag a toujours fait plus âgée qu'elle ne l'était vraiment. Très franche et honnête en dehors de ce fait, elle est consciente qu'il est parfois mieux de se taire que de dire quoi que ce soit, mais ne peut s'en empêcher. Grossière, même, ce qui n'est pas courant, elle sait qu'elle n'est pas très appréciée par les autres, qui préfèrent l'hypocrisie de la bourgeoisie. Pourtant, inconsciemment elle s'y conforme, de part son mariage et son désir que les choses restent comme elles sont. Elle espère pourtant du changement, notamment de la part de son mari (qui ne changeras jamais, rustre qu'il est), et même si elle a une très grande force de caractère, elle ne peut s'empêcher de craindre le tueur, de craindre pour sa vie et celle de ses proches, persuadée qu'ils sont tous fragiles comme du verre. Elle aurait aimé avoir des enfants, mais cette impossibilité biologique la frustre tellement qu'elle se met par période, à détester mères et gamins qui courent dans les rues. Elle n'a jamais eu l'occasion de voir réellement du pays, et considère que c'est très bien comme ça.

Mariée, la vingtaine à peine entamée, c'est Abhain qui lui a demandé sa main un jour de juin. Il venait régulièrement dans son atelier pour faire réparer les accrocs de sa tenue, et à force de conversations avec elle - chose qu'ils appréciaient tous les deux à l'époque - il en a fini par demander sa main sur un coup de tête. Elle, elle savait pour l'avoir vu flirter avec un homme en cachette, qu'il n'allait sans doute jamais l'aimer plus que comme une simple amie. Elle a fait semblant de rien et a accepté, par gentillesse mais aussi parce qu'elle y gagnait. Elle craignait de toute manière d'être mariée de force à un homme qu'elle détesterait foncièrement et qui ne chercherait qu'à la culbuter à tout bout de champs. Une alternative qui la glaçait d'effrois. Elle n'a jamais rien dit à  Abhainn sur ce qu'elle avait découvert de lui, et en fait, elle a simplement occulté cette soirée, se servant des excuses comme - il faisait noir, je n'ai rien vu d'autre qu'une accolade amicale - ou bien - ce n'était pas Abhainn, c'était quelqu'un d'autre - qui ont finalement atteins leur but : qu'elle oublie que son mari ne l'aimerait jamais comme au fond, elle l'aurait souhaité. Son mariage pourtant s'est construit sur les intérêts communs de l'un et de l'autre, le partage des richesses de l'un, et la couverture sociale de l'autre, qui ne devait pas craqueler. C'était un mariage de raison, une stabilité financière, des risques en moins pour la jeune femme - qui paraissait pourtant bien plus vieille - et une fierté pour sa famille à elle, de la voir enfin entrer dans un moule.

Elle s'est contentée de cette situation pendant des années, jusqu'à ce qu'elle commence à perdre les enfants qui grandissaient dans son ventre. L'un après l'autre, et plus ils s'acharnaient tous les deux, moins ça fonctionnais, plus le couple se fissurait. Parce qu'au départ, Abhainn essayait, vraiment, de faire ce qu'il fallait. Le dégoût l'un de l'autre a finit par s'installer entre eux, bien qu'au dehors, toutes les apparences sont sauves, Morag y veille. Si elle est si attentive à la vie morale des autres, la sienne se doit d'être irréprochable, malgré ses propres sentiments qui divergent.